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Evolution de la communication : est-ce que ça vaut le coup d'exagérer ?Communiqué de presse

L'exagération de la taille corporelle est très courante dans le règne animal : les émetteurs de nombreuses espèces produisent des cris exagérément graves pour paraitre plus grands qu'ils ne le sont en réalité, afin de menacer les concurrents ou d'attirer des partenaires potentiels. Mais ce type de tromperie affecte-t-il vraiment les auditeurs ? Les recherches menées par Kasia Pisanski et David Reby, chercheuse et chercheur de l'équipe ENES au Centre de recherche en neurosciences de Lyon (Université Jean Monnet Saint-Étienne/Université Claude Bernard Lyon 1/CNRS/Inserm)1, publiées récemment dans Nature Communications, apportent des réponses à ces questions qui occupent les spécialistes de la communication animale depuis plusieurs décennies.

Le chercheur et la chercheuse ont constaté que les auditeurs humains arrivent fréquemment à détecter quand les émetteurs essaient de paraître plus ou moins grands en modifiant leurs fréquences vocales. Et lorsque les auditeurs détectent correctement un « tricheur », ils recalibrent leurs jugements de taille, en particulier lorsqu’un humain estime la taille d’un autre humain. Cela suggère que la détection de la tricherie peut réduire les erreurs et donc atténuer les effets de la tromperie, en particulier dans des contextes comme la compétition entre humains. Les résultats montrent également qu'il est toujours payant pour les émetteurs d’exagérer. En effet, non seulement la tricherie n'est détectée qu’une fois sur deux, mais même détectée, elle peut rester effective.

Pour étudier ce phénomène, les scientifiques ont utilisé des enregistrements de voix d'hommes et de femmes auxquels ils avaient demandé de paraitre physiquement plus grands, plus petits, ou de parler normalement lorsqu’ils prononçaient une série de voyelles. Ensuite, ils ont diffusé ces enregistrements « tricheurs » ou « honnêtes » à 200 auditeurs auxquels ils ont demandé d’estimer la taille réelle des personnes qui parlaient, puis de décider si ces personnes parlaient normalement ou essayaient d'exagérer ou de minimiser leur taille réelle.

Ils ont observé que, bien que les auditeurs fussent globalement bernés par les signaux exagérés - surestimant les tailles des exagérateurs -, ils conservaient la possibilité de comparer leurs tailles. Par ailleurs, les auditeurs qui pouvaient détecter qu’une personne essayait de paraître plus grande ou plus petite, émettaient un jugement de hauteur plus précis que les auditeurs qui étaient « dupes ».

En révélant la « course aux armements » à laquelle se livrent signaleurs et récepteurs depuis la nuit des temps, cette recherche répond à des questions essentielles pour notre compréhension des origines et de l’évolution de la communication vocale, auxquelles il serait extrêmement difficile de répondre au moyen d’expériences impliquant des animaux. Kasia Pisanski et David Reby espèrent que leur travail encouragera la conception d’études visant à tester si ces résultats se généralisent aux espèces animales, et à la communication en général.

1- au sein de l’Equipe de neuro-éthologie sensorielle du Centre de Recherche en Neurosciences de Lyon

Reference:
Efficacy in deceptive vocal exaggeration of human body size, Nature Communications, Pisanski, K. & Reby, D. (2021)

Blog Behind the Paper dans Nature Ecology and Evolution:
https://go.nature.com/2MLjTwQ

Contact chercheur :
Kasia Pisanski (kasiapisanski @ gmail.com)
Equipe de Neuro-Ethologie Sensorielle ENES - CRNL : Centre de Recherche en Neurosciences de Lyon (Université Jean Monnet Saint-Etienne / Université Claude Bernard Lyon 1 / CNRS / INSERM)

David Reby  (david.reby @ univ-st-etienne.fr)
Equipe de neuro-éthologie sensorielle ENES - CRNL : Centre de recherche en neurosciences de Lyon (Université Jean Monnet Saint-Etienne / Université Claude Bernard Lyon 1 / CNRS / INSERM)
www.eneslab.com

 

Publié le 16 février 2021